jeudi 21 mars 2013

Maternante … ou simplement maman ?

J'avais envie d'écrire cet article en réaction à la rediffusion d'un reportage sur le maternage dit "proximal" ou "intensif" vu à 66 Minutes sur M6, intitulé "la dictature des bébés" (tout de suite, le ton est donné, n'est ce pas ?) et à la vidéo youtube faite par des mamans en réaction à ce reportage. Parce que c'est un peu le genre de débat que je trouve stérile et qui m'énerve. Parce qu'on (et j'entends par "on" essentiellement les média) exagère, qu'on pointe toujours du doigt ce qui ne va pas sans montrer le positif, qu'on ne fait jamais dans la demi-mesure et qu'on va avoir tendance à choisir des extrêmes (ou à les faire passer pour tels) pour illustrer le propos.

J'imagine que si l'on devait me ranger dans une case (parce qu'il faut bien l'avouer, on aime bien ça), on me mettrait facilement dans celle des "maternantes":
- j'ai fait le choix de l'allaitement et d'un allaitement long qui plus est.
- je donne du bio à manger à ma grenouille.
- je préfère l'homéopathie à une longue liste de médocs.
- je porte ma grenouille en porte-bébé physiologique.
- il arrive que la grenouille dorme avec nous.
- je ne veux pas laisser la grenouille pleurer, j'essaie de ne pas lui hurler dessus et de lui expliquer les choses plutôt que de les lui imposer.

En gros, je dois faire partie de cette nouvelle catégorie de mamans baba cool écolo bio un peu bobo,   qui refusent la péridurale et veulent accoucher à domicile, qui font des cures détox ou qui jeûnent, qui kiffent les week ends dans une yourte, sont adeptes du yoga et des graines germées, qui boivent du lait d'amande (parce que le lait de vache, c'est dégueulasse) et mangent du tofu, n'achètent à leur grenouille que des jouets en bois fabriqués par un artisan du fin fond du Jura et qui font beaucoup parler d'elles dernièrement. Parce qu'apparemment, le "maternage", c'est la nouvelle mode.

Et c'est là que je commence à ne pas comprendre. Parce que je ne voudrais vexer personne mais ces pratiques existent depuis la nuit des temps ! Et elles existent encore, si l'on prend la peine d'arrêter de regarder notre nombril d'occidentaux une seconde. A mon sens, c'est plutôt le monde moderne qui a fait qu'on a voulu instaurer une certaine distance entre la mère et son enfant, parce que la femme veut ou doit être libre et travailler, ou, dit plus crûment, être productive. Il s'agit donc pour moi plutôt d'un retour aux sources (certains, comme Elisabeth Badinter, parlent alors de régression) que d'une nouvelle pratique sortant des cerveaux de quelques dégénérées ou dépressives en manque d'amour (parce que c'est souvent comme ça que l'on dépeint les "maternantes"). Les Africaines qui portent leur enfant sur le dos toute la journée ont-elles attendu la mode du "maternage" pour adopter le portage ? Les animaux qui dorment tous avec leurs petits ont-ils succombé à la mode du cododo ? Le veau va-t-il remplacer le lait de sa mère par du lait de jument parce que téter sa mère trop longtemps, c'est "mal" mais qu'il faut quand même qu'il boive du lait ? L'OMS, lorsqu'il recommande deux ans d'allaitement, a-t-il lui aussi cédé à la mode ?
Je pense donc qu'il faudrait faire preuve d'un peu plus d'humilité, d'ouverture d'esprit et parfois de bon sens, avant de regarder ces pratiques avec notre regard inquisiteur d'homme occidental moderne.

Je crois juste que chaque maman choisit ce qu'elle considère être le mieux pour son enfant, qu'elle adapte son mode d'éducation à son mode de vie, à ses envies, à sa vision de la maternité, et surtout qu'elle fait tout cela avec beaucoup d'amour, et après tout, c'est ce qui compte le plus.

En ce qui me concerne, même si sur le papier je pourrais effectivement être considérée comme "maternante", dans les faits je me sens simplement maman. Parce que je fais ce qui me semble le mieux, pour ma grenouille, pour moi, pour le Daddy, pour notre famille, sans chercher à rentrer dans une case plus qu'une autre.

J'allaite la grenouille, c'est vrai, et ce depuis 16 mois. Je n'ai cependant jamais abordé l'allaitement en me disant que j'allais l'allaiter longtemps. Ca s'est fait comme ça, c'est tout, parce que c'est ce qu'on pense être le meilleur pour elle. Et que je ne comprends toujours pas pourquoi il paraît plus "normal" aux yeux de la plupart des gens de donner du lait de vache (et je crois que je n'en saurais jamais rien).  (Qu'on me comprenne bien, je ne fais pas de procès aux femmes qui ont décidé de ne pas allaiter ou n'ont pas pu, je dis juste que je ne comprends pas pourquoi on fait un tel drame de l'allaitement "long", c'est à dire dès qu'on dépasse les 6 mois, voire les 3) Selon moi, soit un bébé a encore besoin de lait et le choix du lait maternel ou du lait de vache / lait artificiel appartient aux parents pour la durée qui leur convient, soit le bébé n'a plus besoin de lait, et à ce moment là on n'en parle plus. Mais j'ai souvent l'impression qu'il y a une date à laquelle le bébé aurait encore besoin de lait mais pas de celui de sa maman, et c'est ce raisonnement là que, personnellement, je trouve bizarre, et pas celui de la nana qui décide d'allaiter son petit de 18 mois. 
Je dois cependant avouer avoir du mal avec le fait d'allaiter au delà de, disons, 3 ans, car au delà de cet âge, il me semble qu'un enfant n'a plus vraiment besoin de lait et peut manger la même chose qu'un adulte. Alors oui, je sais, il y a cette histoire de sevrage naturel, mais je crois que si la mère ne dit pas stop à un moment, le bébé peut un peu abuser (et on sait que ça aime bien abuser ces petites choses).
De plus, je ne serais pas à l'aise avec l'idée que la grenouille se rappelle "consciemment" de cette expérience de l'allaitement, et encore je dois dire que je trouve cela moins "gênant" que s'il s'agissait d'un garçon. Il me semble en effet difficile, en tout cas pour moi, de gérer cette relation fusionnelle et charnelle avec un enfant d'un certain âge avec des "problèmes" tels que le complexe d'Oedipe et le rapport de l'enfant avec le parent du sexe opposé, ou avec l'entrée à l'école où l'enfant risque de se sentir "marginalisé". Mais je parle évidemment là de choses que je ne connais pas et ne veut donc pas m'aventurer plus loin sur ces considérations.

Je porte la grenouille, en porte bébé physiologique, parce que je trouve cela plus confortable pour elle comme pour moi et que je trouve pratique le fait que je puisse également la porter sur le dos avec. Je trouve important d'avoir un contact avec son bébé, notamment dans les premiers mois de la vie. Mais j'ai également une poussette, et je m'en sers ! Tout dépend de ce que je fais, du type de balade, de la durée, de l'envie et de l'état de fatigue du moment … Et puis maintenant qu'elle marche, j'avoue avoir de moins en moins recourt au porte bébé parce qu'elle adore gambader.

La grenouille dort parfois avec nous : elle finit souvent sa nuit dans notre lit et il arrive qu'elle dorme avec nous quand elle se réveille au milieu de la nuit ou quand elle n'est vraiment pas bien. Je n'ai  cependant jamais vraiment considéré qu'on faisait du cododo. Mais le cododo, c'est quoi en fait ? C'est "dormir avec" mais dans le même lit ou dans la même chambre ? toute la nuit ou seulement une partie ? Selon ce qu'on entend par cododo, on peut dire qu'on en a fait qu'occasionnellement depuis la naissance de la grenouille ou à l'inverse qu'on en fait toujours. Personnellement, je suis aussi "choquée" par un enfant de quatre ans qui dort toujours dans le lit de ses parents que par un bébé de seulement quelques jours qui dort tout seul dans sa chambre alors qu'il vient de passer neuf mois au chaud, bercé par les battements du coeur de sa mère et de débarquer dans un monde qu'on pourrait presque qualifier d'hostile.

En ce qui concerne l'éducation, je n'adhère pas vraiment à l'idée que c'est à l'enfant de décider quand ces pratiques doivent "prendre fin", que ce soit pour l'allaitement ou le cododo. Je pense (et c'est évidemment un point de vue tout à fait personnel) que l'enfant cherche les limites et que c'est à nous, parents, de les lui donner. L'enfant va très souvent chercher son plaisir immédiat, et pas forcément ce qui est le mieux pour lui. Je suis plutôt globalement partisane du fait de regarder les choses comme elles se passent dans la nature. Très souvent, chez les animaux, la maman dit stop. Pour l'allaitement par exemple, à un moment donné, la mère va repousser son petit qui veut téter, on ne peut pas vraiment dire qu'elle attende ce qu'on appelle le "sevrage naturel", si tant est qu'il existe.
Toujours en ce qui concerne l'éducation, je suis évidemment contre la violence physique et en faveur du dialogue et de l'explication. Mais je suis aussi pour le fait d'instaurer des limites, des règles, de façon à ce que la grenouille ait un sens du vivre ensemble et une idée de ce qui est bien et mal : on ne tape pas, on ne jette pas la nourriture par terre, on fait des efforts (on mange un peu de tout par exemple) …

Tout cela, ce sont nos choix, ceux du Daddy et les miens, pour notre grenouille, dans le cadre de notre vie de famille et de notre vie de couple, de notre conception de la parentalité, de notre histoire personnelle et familiale, de nos convictions et envies. C'est l'équilibre que nous avons trouvé et les idéaux auxquels nous voulons aspirer. C'est notre vérité.
Chaque couple, chaque famille, chaque parent fait ses choix, trouve son équilibre et sa propre vérité; et ces choix doivent être respectés, parce qu'ils sont faits avec ce qui compte le plus : de l'amour. Et je ne comprends pas pourquoi on pointe du doigt certaines pratiques, alors qu'elles ne me semblent pas plus "dangereuses" que d'autres, communément admises.


Suis-je "maternante" ? Je ne sais pas, et je m'en moque. Ce que je sais, c'est que je suis une maman, tout simplement.


Et vous, vous sentez vous "maternante" ? Que pensez vous de ce "débat" autour du "maternage" ?

3 commentaires:

  1. Ca me parle ton article ! Je n'ai pas vu ce reportage mais j'ai lu bien des choses sur les "maternantes", la "moticité libre" etc, et perso, j'aime pas être mise dans une case, je suis maman, point. Si ça t'intéresse, j'en ai déjà parlé dans cet article: http://www.monptitboudoir.fr/article-pourquoi-faire-simple-quand-on-peut-faire-compliquer-116320480.html

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  2. Je suis d'accord avec chaque ligne!
    J'allaite toujours ma fille de 10 mois et je commence à me lasser de la fameuse question "hein! tu lui donnes encore le sein et tu vas l'allaiter jusque QUAND?"
    c'est pas toujours facile de laisser glisser les remarques, mais ça commence à venir. Ma fille est épanouie, qu'importe l'opinion des autres (qui d'ailleurs la trouvent eux mêmes heureuse comme tout, calme etc etc)
    merci pour tes articles qui me parlent énormément

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    1. Merci beaucoup pour ton message ! Ça me touche :)
      Il n'est effectivement pas toujours facile d'assumer ses choix, surtout avec la pression que les autres peuvent nous mettre. Mais les sourires et le bonheur de nos grenouilles n'ont pas de prix, et c'est la plus belle récompense.

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